Il n'y a que peu d'animaux qui peuvent se vanter autant que le chevreuil, d'avoir colonisé autant de territoire depuis 50 ans au Québec. Au début des années 60's la population de chevreuils au Québec était considérée comme en danger immédiat de disparaître. Certaines régions de la province n'avaient aucun chevreuil sur leur territoire.
Dans le but de protéger le cheptel de chevreuils restant, des lois sévères ont été promulguées pour restreindre la chasse et plus particulièrement la chasse aux femelles reproductrices. Cette règlementation ''la loi du buck'' a longtemps été conservée et admirée. Mais cette réglementation a ignoré un fait particulièrement troublant. Une femelle chevreuil devient mature sexuellement après seulement 7 ou 8 mois et va donner naissance habituellement à des jumeaux à chaque année pendant 6 ou 7 ans.
Des résultats ''géométriques''
Cette façon de se reproduire donne des résultats géométriques. Dans le sens que les populations de chevreuils ne doublent pas seulement à chaque année, mais progressent de façon exponentielle. C'est comme l'intérêt composé. Une population de chevreuils qui a suffisamment de nourriture et qui n'est pas réduite par les hivers difficiles et par les prédateurs (incluant les humains), va doubler tous les 3 ans.
Compte tenu des restrictions imposées aux chasseurs, le nombre de chevreuils s'est lentement accru au départ, mais a ensuite explosé dans toutes les régions. Il y a plus de chevreuils au Québec aujourd'hui qu'il n'y en a jamais eu dans toute son histoire. De plus la majeure partie de l'augmentation des chevreuils est arrivée dans les zones péri-urbaines auxquelles les chevreuils se sont particulièrement bien adaptés.
Une question de nourriture
Aussi paradoxal que cela puisse paraître, le développement des infrastructures rurales en zones péri-urbaines a augmenté la disponibilité des sources de nourriture pour le chevreuil. La survie de cette espèce dépend essentiellement de la nourriture disponible. Plus de nourriture a engendré plus de chevreuils.
Les chevreuils broutent les nouvelles pousses vertes de la végétation. Avec l'étalement urbain les promoteurs ont rasé de larges espaces couverts d'arbres matures. La repousse de la végétation a ajouté de nouvelles sources de nourriture pour les chevreuils. Il y a moins d'arbres, mais ceux qui repoussent sont jeunes et représentent une meilleure nourriture que dans les forêts matures antérieures. Si on ajoute la prédominance du mais et du soya comme culture dans les champs connexes aux municipalités péri-urbaines, les chevreuils qui habitent ces zones sont drôlement bien nourris.
Les restrictions à la chasse
Personne ne veut voir un chasseur récolter un chevreuil près d'une école. Il ne faut donc pas se surprendre que les municipalités ont expulsé les chasseurs de plusieurs des espaces occupés par les chevreuils, au moyen de règlements identifiant la chasse comme une nuisance publique. En enlevant l'unique prédateur connu, on a permis aux populations de chevreuils de littéralement exploser.
De nos jours les élus municipaux ne savent plus comment répondre à une telle abondance de chevreuils. Devrait-on essayer de les capturer un par un et de les relocaliser à l'extérieur du territoire municipal ? Cette approche qui a été tenté dans plusieurs municipalités américaines a coûté environ $360.00 par animal. Et cette approche n'a pas fonctionné, parce que pour chaque chevreuil capturé et relocalisé à l'extérieur du périmètre de la ville, un autre chevreuil de l'extérieur venait immédiatement remplacer le chevreuil expulsé à cause de l'abondance de nourriture.
C'est le même problème avec les outardes. Les oies du Canada communément appelés outardes au Québec deviennent de plus en plus nombreuses dans certaines localités. Elles occupent les plans d'eau disponibles dans les parcs municipaux et finissent par causer des dommages importants. Vous en voyez en grand nombre sur les espaces gazonnés des villes.
Et ce n'est pas terminé. Le réchauffement climatique fera en sorte qu'elles se reproduiront encore plus facilement sans effectuer de longs trajets comme elles avaient l'habitude de faire.
Contrôle des populations
Il n'y a en fait que deux façons de contrôler les populations de chevreuils. Soit vous augmentez le nombre de chevreuils morts à chaque année, soit vous essayez de réduire le nombre de naissance. C'est aussi simple et rudimentaire que ça.
Réduire le nombre de naissance est peut-être le moyen le plus ''éthiquement'' acceptable pour la population en général. Mais cette approche implique que vous capturiez un nombre important de femelles pour les stériliser ou encore pour leur donner une injection de contraceptif. Ce moyen qui demande un effort financier important et qui doit être effectué à chaque année a rapidement été abandonné par ceux qui ont essayé de le mettre en application.
Ce que nous reste, c'est d'augmenter le nombre de mortalités. Au Québec les autorités (MRNF) ont rapidement préféré augmenter la durée de la saison de chasse et/ou, selon les années et les zones allouer un nombre important de permis pour récolter des femelles.
Mais dans les municipalités qui ont banni l'usage d'armes sur leur territoire, le problème ira sûrement en s'amplifiant. Le nombre de chevreuils, dans les ilots boisés en zone péri-urbaine sous le contrôle des municipalités, va s'accroitre proportionnellement à l'abondance de nourriture. Avec le réchauffement climatique il faut réaliser, que nous n'en sommes qu'au début dans notre confrontation avec le chevreuil.
Tant que les municipalités et le ministère de la faune ne choisiront pas les chasseurs comme des partenaires essentiels dans le contrôle des populations de chevreuils, la surpopulation de cet animal magnifique dans certaines régions spécifiques demeurera problématique.
Nanook
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